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      L'ARQUITECTURA

                       L’art roman roussillonnais apparaît et se développe à l'intérieur d’un grand mouvement artistique qui affecte l'Europe Occidentale entre le X° et le XIII° siècle. Il participe donc à la naissance et à l’épanouissement de l’art roman européen, par-delà les frontières de nations et d’Etats. Cependant il acquiert en Roussillon quelques caractéristiques particulières en raison de l’émergence de traditions locales, de l’originalité d’artistes, de la nature des matériaux, des contraintes de la géographie et de l’histoire qui imposent des choix politiques, de telle sorte que l’on peut parler, d’une certaine manière, d’un " art roman du Roussillon ".

L’ART PREROMAN

Avant que n’apparaissent les prémices de l’art nouveau venu d’Italie, on construisait et on décorait en Roussillon en utilisant des techniques héritées du passé local et de vieilles traditions méditerranéennes. Les monuments qui subsistent, antérieurs à l’an mil, appartiennent à la mouvance artistique que l’on dénomme d’une manière assez générique, l’art préroman.

Au nombre des édifices préromans que l’on peut citer comme particulièrement caractéristiques et assez bien conservés, il y a :

- de petits monuments ruraux tels que Saint-Michel de Sournia, Sainte-Félicité de Sournia, Saint-Vincent de Fourques, Saint-Nazaire et Celse d’Ansignan, la moitié nord de l’aqueduc d’Ansignan, Saint-Martin de Fenollar à Maureillas... à côté d’un nombre bien plus important d’édifices en grande partie ruinés ou très remaniés.

- il y a enfin les trois abbatiales, saint-Michel de Cuxa, Saint-Génis des Fontaines, Saint-André de Sorède.

Caractéristiques de l’art préroman en Roussillon

A vrai dire il n’est pas très différent de celui que l’on peut observer en Catalogne ou dans le Languedoc voisin.

Plans

- Les petits édifices ruraux sont à une seule nef (4 à 12m), les murs sont souvent bordés per une petit banc de pierre (Fenollar).

- A l’Est, se trouve une abside quadrangulaire, le plus souvent trapézoïdale et desaxée par rapport à la nef (voir ce désaxement du haut de la colline qui domine Saint-Michel de Cuxa).

- Entre nef et abside se dresse un mur dans lequel on a réservé un arc triomphal. La séparation entre les deux éléments de l’église est bien marquée par l’avancée importante de piédroits et par les degrés qui rehaussent le sanctuaire.

- Exceptionnellement, le sanctuaire est en forme d’abside arrondie (Abside sud de Saint-Michel de Sournia; abside de Sainte-Marie de Formiguères)

- Sournia présente la caractéristique assez rare de deux nefs accolées, parallèles, avec une porte de communication entre les deux. La nef nord est la plus ancienne. Celle du sud (fin X° siècle) est un agrandissement de l’église.

Mode de construction

- On construit en opus incertum (pierres brutes, non-dégrossies), noyé dans le mortier, sans souci d’assise régulières.

- Les chaînages d’angle ou les pourtours d’ouvertures sont dressées en grands moellons taillés.

- On utilise aussi souvent des assises d’opus spicatum.

Les fenêtres étroites n’ont pas d’ébrasement extérieur, elles sont surmontées par un linteau monolithe échancré d’un petit arc.

- Les arcs sont caractérisés par une importante avancée des piédroits. L’arc lui-même peut être outrepassé (Sournia) ou non (aqueduc d’Ansignan).

- Ces arcs peuvent être montés en moellons taillés ou, le plus ouvent, sont dessinés en réserve dans le mur et clavés au sommet. On peut les dénommer " de tradition wisigothique " en raison de l’utilisation par les Wisigoths de formes comparables, mais ils osnt en réalité les héritiers de vieilles traditions romaines. En aucun cas ils ne sont arabes ou mozarabes, en Roussillon.

Les nefs sont charpentées. Les absides sont parfois couvertes par une voûte plein cintre retombant en arrière de l’aplomb des murs porteurs.

Les abbatiales préromanes

Sur le plan de l’architectonique, les techniques de maçonnerie sont identiques à celles employées dans les petits édifices. Ce qui varie, essentiellement, ce sont les dimensions et les plans.

Saint-Génis et Saint-André ont de vastes nefs uniques, jadis charpentées. On ne se laissera pas abuser par les voûtements tardifs de l’époque romane.

Ces églises possèdent également un transept largement débordant.

Le transept est voûté, de même que les absides. La voûte retombe en arrière de l’apomb des murs.

Dans ces abbatiales, les fenêtres sont de grande dimension, selon la tradition carolingienne ou paléochrétienne.

Les arcs sont de traditions wisigothiques.

Saint-Michel de Cuxa a trois nefs ou, plus exactement, une nef large et deux couloirs latéraux de circulation, plus courts à l’ouest, jadis charpentés. Les séparations des nefs sont très murales, la communication se faisant par des arcs fortement outrepassés, ouverts dans les murs.

Le choeur quadrangulaire et désaxé par rapport à la nef, reprend certainement les contours d’un bâtiment antérieur.

Les grandes ouvertures, de part et d’autre du sanctuaire, portes surmontées de fenêtres n’ont, curieusement, d’équivalent qu’en Orient.

Décors

Les décors peints ne subsistent plus qu’à l’état de traces à Saint-Michel de Cuxa où ils devaient couvrir une grande partie de l’édifice. Les peintures étaient à base de couleur ocre, rouge, blanche.

Les décors sculptés préromans ne sont pas très abondants en Roussillon. Du VIII° au XI° siècles, nous pouvons noter:

- la cuve des fonds batismaux de la cathédrale Saint-Jean de Perpignan, autrefois à Saint-Jean le Vieux, représentant une cuve de bois dont les douelles seraient serrées par un câble, avec une figuration schématique de tête coiffée à la manière syrienne,

- huit chapiteaux de la partie orientale de la crypte de Saint-Martin du Canigou, d’ascendance byzantine par l’épannelage avec des réminiscences hispano-rtomaines ou wisigothiques dans le décor, traités de manière très rustique.

- la vasque de marbre de Saint-André de Sorède décorée en méplat d’un rinceau de feuilles de lierre, d’une tresse à trois brins, de grappes de raisin et d’un motif de volutes.

- quatre tables d’autel à lobes, dans la tradition des tables narbonnaises dont les motifs s ’apparentent aux décors à lobes des tables syriennes et à des décors d’ivoires carolingiens. La plus remarquable est celle de la cathédrale d’Elne, peut-être contemporaine de 916.

LE PREMIER AGE ROMAN

Architecture

Il apparait en Roussillon pour la première fois à Saint-Martin du Canigou entre 1005 et 1009, dans la partie occidentale de l’église inférieure, oeuvre du moine de Cuxa, Sclua, puis à Saint-Michel de Cuxa, après 1010, dans les nefs transervales du Pessebre d’abord, oeuvre peut-être du même Sclua, puis dans toutes les extensions de l’abbatiale commandées par l’abbé Oliba.

On peut considérer que le premier âge roman recouvre, globalement, le XI° siècle. Appartiennnent à ce style, outre les édifices désignés ci-dessous: - l’abbatiale d’Arles-sur-Tech - la cathédrale d’Elne - Sainte-Eulalie de Fuilla - Saint-Nazaire de l’Ecluse-Haute - La nef de Serrabone - Saint-Vincent d’Eus , pour ne nommer que les édifices les plus intéressants.

Caractéristiques

Cet art nouveau est le fruit d’un apport extérieur mais n'hésite pas, au besoin, à intégrer des traditions locales.

L’Italie du Nord et principalement la Lombardie, semble être à l’origine des innovations architecturales. Il est probable qu'elles aient été appotées par des maçons lombards, mais il est possible également que des maîtres d’oeuvres locaux se soient formés en Italie. Ce fut peut-être le cas de Sclua.

Il est à noter que le Roussillon est l’une des premières régions d’Europe, en dehors de l’Italie, à recevoir l’art roman, peu après l’an mil.

Les caractères les plus remarquables de cet art sont:

- l’invention de la pile articulée qui divise la nef en travées,

- la généralisation de la voûte en plein cintre ou d’arêtes, portée ou non par des arcs doubleaux. Cependant, en Roussillon on reste longtemps fidèle à la couverture en charpente et beaucoup d’édifices ne reçoivent une voûte sur les nefs qu’au XII° siècle (Arles),

- l’utilisation d’un appareillege de petits moellons restangulaires débités au marteau, disposés en assises régulières avec des joints épais,

- l’ébrasement extérieur des fenêtres surmontées désormais par un petit arc clavé,

- le décor de petits arcs festonnant le haut des murs, souvent associés aux lésènes ou bandes lombardes,

- l’installation de niches extérieures dans la voûte des absides (Arles),

- l’apparition du clocher de type lombard à Saint-Michel de Cuxa, imitant les clochers italiens (Fruttuaria), notamment de la région de Cômes.

Les résistances à l’art lombard se manifestent dès le début, dans la construction de l’église haute de Saint-Martin du Canigou avec son vaisseau couvert en plein cintre uni, reposant comme un couvercle sur des colonnes,

- le décor d’arcatures et de lésènes ne s’impose pas partout,

- permanence, parfois, de l’opus incertum ou de l’opus spicatum,

- fenêtres sans ébrasement extérieur.

Le décor

Alors que, en règle générale, le premier art roman en Europe se distingue par la pauvreté du décor sculpté, en Roussillon apparaissent très tôt des ateliers de sculpteurs dont la production est remarquable.

Les chapiteaux de la nef de l’église supérieure de Saint-Martin du Canigou comptent parmi les premières réalisations encore rudes de la sculpture roussillonaise. La corbeille tronconique est couverte de motifs végétaux dans un style frustre, très linéaire modelé en méplat, qui doit beaucoup à la technique des ivoiriers.

L’art de sculpter marque un progrès décisif avec le linteau de Saint-Génis des Fontaines, première réalisation sculptée de l'art roman en France, parfaitement datée de 1019-1020. Sens très aïgu de la composition, abandon de la simple gravure pour arriver au modelé, font de cette réalisation un vrai chef-d’oeuvre.

Dans la ligne de l’atelier de Saint-Génis des Fontaines il faut placer la décoration de la façade de Saint-André de Sorède, première application de la sculpture à un ensemble monumental, et la façade de l’abbatiale d’Arles.

A une toute autre ambiance appartiennent les fragments dispersés d’une porte de Saint-Jean le Vieux. Le style nous rapproche de celui des marbriers narbonnais des X°-XI° siècles et le modèle de cette porte est à rechercher dans des sources paléochrétiennes. Cette sculpture témoigne de la renaissance antiquisante dès le XI° siècle.

A la même époque on poursuit la série des tables d’autel à lobes, mais dans le style local qui représente des variantes par rapport à celui de la tradition narbonnaise. Exemple, la table de Saint-Génis.

Il faut enfin placer parmi les réalisations de la première sculpture romane les chapiteaux encore rudes de la cathédrale d’Elne. Ils conservent l’épannelage des chapiteaux composites classiques mais leur corbeille est plus massive. La sculpture est pleine d’archaïsmes mais annonce déjà des formules qui seront développées au siècle suivant.

Sainte-Marie de Planès

Il faut citer à part l’étrange èglise de Planès dont la construction pourrait remonter à la fin du XI° siècle, à la jonction des deux âges romans. C’est un édifice à plan centré surmonté par une coupole établie sur trois massifs de maçonnerie disposés en forme de triangle équilatéral. Le tout inscrit dans un cercle. Point de mystère pourtant en cela. Le plan centré est traditionnel dans les églises mariales et le triangle équilatéral est symbole de la Trinité. Finalement on peut voir dans ce sanctuaire peu commun une autre représentation de l’idée qui a présidé à la construction par l’abbé Oliba des deux sanctuaires superposés de Cuxa dédiés à Marie et à la Trinité. Il n’en reste pas moins que l’église de Planès est exceptionnelle, comme l’antéglise de Cuxa, et mérite une place à part dans l’art roman roussillonais.

 

LE SECOND AGE ROMAN

Il n’y a pas de véritable rupture entre les deux périodes romanes. La seconde qui occupe, globalement, le XII° siècle et s’étend jusqu’au XIII° siècle marque l’épanouissement naturel, voire le pertfectionnement des découvertes techniques antérieures. C’est pourquoi on préfèrera parler de 1° et 2° âge plutôt que de 1° et 2° art roman.

Parmi les monuments représentatifs, citons: la collègiale de Corneilla de Conflent, Saint-Jacques de Villefranche de Conflent, Saint-André d’Angoustrine, Sainte-Marie de Coustouges, Sainte-Marie d’Espira de l’Agly (avec ses murs de marbres polychromes), le prieuré de Marcevol, Sainte-Marie de Montferrer, Saint-Jean le Vieux de Perpignan, l’église et al grange fortifiée de Sequerre, le chevet de Serrabona.

 

Caractéristiques:

Aucun grand chantier d’église n’est ouvert en Roussillon et, de ce fait, on ne constate pas des innovations majeures en architecture. On se contente, le plus osuvent, des acquis de l’époque précédente. Les seules différences notables sont:

- l’emploi de pierres soigneusement taillées en moyen appareil (Corneilla). Mais dans la plaine on continue à utiliser le blocage et même les galets de rivière bruts, comme aux époques précédentes.

- la généralisation de la voûte sur tous les édifices. On en vient à voûter les églises romanes du XI° siècle ou les nefs préromanes qui ne l’étaient pas (Saint-Génis, Saint-André).

- l’extension de la sculpture à toutes les parties de l’édifice (fenêtres de Corneilla) (- la création de beaux portails sans sculptures: Saint-Martin de Corsavi, Sainte-Cécile de Cos, Saint-Pierre de Riuferrer, ou richement décorés: Corneilla, Villefranche, Saint-Jean le Vieux, Coustouges, Brouilla, Le Boulou, Monaster del Camp, Cabestany.

- une large utilisation des marbres de Céret ou de Conflent pour cette sculpture.

Cloîtres et tribunes

La principale caractéristique du second âge roman roussillonnais réside dans les cloîtres et les tribunes.

-Cloître de Saint-Michel de Cuxa, dispersé et partiellement remonté; de Serrabone; de Saint-Martin du Canigou, reconstitué à partir d’épaves; d’Elne merveilleusement conservé.

- Tribune de Serrabone toujours intacte, de Cuxa réduite à l’état d’éléments disloqués.

La perfection et l’originalité de ces réalisations témoignent de l’existence et du fonctionnement d’un grand atelier de sculpture utilisant les marbres locaux, entre 1120-1130 (Cuxa) et le début du XIII° siècle (Elne). Cet atelier ne doit rien aux premiers sculpteurs roussillonnais dont la production s’arrête vers le milieu du XI° siècle, sans suite. L’innovation sculpturale, vers la fin de ce siècle, appartient désormais à df’autres régions, notamment à Toulouse. L’ouverture des chantiers monastiques dans le premier tiers du XII° s. permet l’éclosion d’un art neuf mais qui s’inscrit bien dans l’évolution de la technique de la sculpture en France et en Catalogne. Il n’empêche: l’atelier de Cuxa a fait école et l’on a une typologie bien roussillonnaise de chapiteaux, à fonds striés, recouverts de végétaux ou de monstres dont les modèles semblent inspirés par les manuscrits orientaux.

La tribune dont seule celle de Serrabone subsiste, est, sous la forme qu’on lui connait, une idée typiquement roussillonnaise. Tout à la fois jubé qui divise l’église en deux et choeur haut, elle impose sa masse sculptée dans un marbre hautement coloré.

On ignore le nom des grands maîtres de la sculpture roussillonnaise. Seul est connu Raimond de Bianya qui a signé une sculpture dans la galerie méridionale du cloître d'Elne qu’il a sans doute terminée à la fin du XII° siècle. Quant au fameux Maître du tympan de Cabestany, c’est un artiste anonyme itinérant dont l’essentiel de l’oeuvre en dehors du Roussillon (Cabestany, Le Boulou, Monastir del Camp) est concentrée en Catalogne Sud et dans les Pays d’Aude, avec quelques réalisations plus lointaines (Toscane, Navarre).

Décors peints

L’utilisation du marbre coloré pour les sculptures va de pair avec les abondants décors peints qui, dans certains cas, recouvraient la totalité des édifices.

Ceux qui subsistent ne sont que des lambeaux du patrimoine pictural du XII° siècle. Les églises les plus riches s’en sont débarrassées les premières avec les changements de goût et les créations qui s’en suivirent. Finalement les plus riches peintures se rencontrent dans les bâtiments les plus humbles, là où on s’est contenté de les recouvrir de plâtre: Fenollar, L’Ecluse, Cazenoves près d’Ille, Marcevol, Sainte-Marie de Riquer. Mais aussi, de manière inattendue, dans l’absidiole de la façade orientale d’Arles. Ces oeuvres s'inscrivent dans la mouvance de la grande peinture murale catalane.

Autres décors

Les modes et changements de goût ont fait disparaître les peintures sur bois des autels ou des retables des églises les plus riches. C’est dans les petits sanctuaires de la montagne de Cerdagne que l’on a conservé quelques-uns: devant-d’autels d’Hix (à Barcelone), d’Oreilla, du Château des Rois de Majorque (origine cerdane), de la Llagonne; baldaquin de la Llagonne; retable d’Angoustrine (à Ille).

Le Roussillon possède d’autres richesses d’art roman, rares en France, telles que les portes de bois à riches pentures (Corneilla, La Trinité) ou de belles grilles de fer forgé (Coustouges).

Sculptures sur bois:

On se contentera de signaler un certain nombre de Vierges romanes assises, en attitude frontale, l’Enfant bénissant posé sur les genoux. Ce sont les Mare de Deu si populaires en Pays catalan et notamment dans la montagne de Cerdagne, Vallespir ou Conflent. Leur visage souvent rude est empreint de dignité, les vêtements sont traités sans élégance. A une époque récente beaucoup de ces statues ont été victimes de la cupidité et ont été volées. Mentionnons le groupe des trois statues de Corneilla de Conflent et, dans le même style la Vierge de Thuir, en plomb.

Au nombre de ces oeuvres d’art du second âge roman roussillonnais, il faut compter aussi les Christs romans revêtus d’une longue tunique, en attitude de gloire, ne montrant aucune trace de souffrance. Ce sont les Majestats qui dans leur crucifixion annoncent la gloire de la résurrection. Majestés de la Trinité, de Bellpuig, dAngoustrine, de la Llagonne.

Signalons enfin le beau Christ en bois de Formiguères qui n’est pas l’élément d’une crucifixion mais d’une descente de croix comme on en connaît plusieurs en Catalogne (ex. Saint-Jean des Abadesses).

LES MANIFESTATIONS TARDIVES DE L’ART ROMAN

Au XIII° siècle, alors que l’art gothique envahit l’Europe, le Roussillon hésite à adopter les nouvelles mutations. Il est vrai que, la Catalogne abandonnant ses prétentions languedociennes ou provençales, le Roussillon se trouve, de ce fait, rejeté loin des centres de décision. Entre l’ouverture aux courants novateurs et un attachement aux traditions, on choisit souvent la deuxième voie. Mais cet art roman tardif a quelque chose d’artisanal et d’archaïsant, il n’est pas soulevé par le souffle créateur. C’est dans cet esprit qu’a été créé le cloître de Saint-Génis. On y retrouve des emprunts de l'époque antérieure mais traités assez maladroitement, auquel s’ajoutent des éléments décoratifs entièrement nouveaux et étrangers à l’esprit roman. Le goût pour les matériaux colorés s’exacerbe dans la juxtaposition de marbres polychromes jamais utilisés auparavant, comme si l'abondance de couleurs devait suppléer la pauvreté technique de la sculpture.

Les dernières galeries du cloître d’Elne marquent également également ce poids de la tradition. Jusqu’au XIV° siècle, on s'évertue à recopier un modèle connu et aimé. Cependant, on ne peut empêcher l’apparition de décors typiquement gothiques dans ce cadre roman.

La permanence de la tradition s’affirme aussi dans les Mare de Deu que l’on préfère résolument aux statues gothiques en pied. L’évolution est marquée cependant par des détails: richesse de la robe, couronne, Enfant glissant sur le côté et jouant avec la pomme ou un oiseau (Formiguères). Peu à peu, l’esprit change, dans le respect toutefois des formes traditionnelles: Marie n’est plus, avant tout, le Siège de la Sagesse présentant le Sauveur au fidèle, mais la Femme élue de Dieu, " Notre-Dame ".

 André BONNERY                         

                                                                 

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